Chers lecteurs, vous vous amuserez (ou vous nous pardonnerez) ce titre un poil aguicheur mais tellement, totalement d’actualité. L’immobilier neuf est au cœur de nos préoccupations. En temps normal et par temps de Covid quand les cartes sont rebattues par des impondérables inimaginables il y a une année encore. Alors, grimpera ? grimpera pas ? investir... ou pas ? Plusieurs professionnels de l’immobilier comme du BTP, se sont pliés à l’exercice des questions – réponses et nous les en remercions.
Harder (de la difficulté à mener les chantiers sous Covid)
«Mais tout est un casse-tête !», commente Claude Wagner, mi-figue mi-raisin. Le fringant quinqua, à la tête de plusieurs sociétés dont Bati C, Bati Travaux et Poliform ne manie pas la langue de bois et confie que, par temps de Covid, la tâche est ardue dans le BTP : «Il y a toujours énormément de travail mais nous sommes malheureusement à un rendement de 75-80 % en raison du virus. On dénombre 25 à 30% d’absentéisme. Pour vous donner une idée, en temps normal, nous avoisinons les 4 %. Dorénavant, seulement trois personnes sont autorisées par camionnette ce qui engendre des coûts supplémentaires puisqu’il faut donc plus de véhicules. On n’a pas le droit de se croiser sur les chantiers, il faut deux fois plus de matériel, la vie de promiscuité, la vie de chantier par définition, a disparu...
Tout est devenu compliqué. Ce qui se faisait en 5 jours, se fait en 7. Sur le chantier de Schifflange (centre commercial qui accueillera notamment Bâti C, Bati Travaux, mais aussi une crèche et Oberweis, ndlr), j’avais une avance de deux mois. Mon retard est maintenant de… deux mois. Côté importation de produits et main d’œuvre, c’est aussi assez cocasse», sourit Claude Wagner. «Par exemple, les châssis et vitrages viennent de Pologne par transporteur, tracasseries administratives et sanitaires aux frontières sont légions... Sur la question de la main d’œuvre, c'est épique aussi : nombreux sont les travailleurs étrangers qui n’ont pas les bons tests Covid exigés aux frontières et sont alors refoulés, donc le manque de main d’œuvre étrangère est fortement notable.
«Les quartiers neufs sont souvent soumis à des concepts de vie innovants.»
De tous les côtés, il faut s’adapter en dernière minute et se conformer aux exigences sanitaires/humaines/de transport de marchandises, qui changent perpétuellement.Concernant l’administratif, le travail est aussi moins efficace. Les commissions des bâtisses se faisant en vidéo, des retards sont inévitables».
«Néanmoins, tempère Delphine Romano, Head of Residential Agencies au sein de Inowai, les démarches pour acquérir restent globalement rapides, une à deux semaines pour un particulier pour un accord de la banque, un mois et demi pour espérer signer un acte notarié d’achat.»
Better (encore et toujours une aventure positive)
Lex Fischbach se veut optimiste : «Bien sûr que j’encourage les particuliers à investir dans l’immobilier, a fortiori le neuf qui reste une fabuleuse aventure ! Il faut avant tout s’informer de la renommée du promoteur/constructeur que l’on choisit pour ce projet de vie. Il est ainsi incontournable de s’assurer des garanties offertes : garantie bancaire d’achèvement, garantie biennale et décennale et comparer le cahier des charges avec d’autres sur le marché (cf notre lexique pour les débutants).»
«D’autre part, hormis la qualité du travail et la renommée du promoteur/constructeur, la situation du bien immobilier est primordiale : il convient de s’assurer d'une bonne situation géographique avant d'acquérir et ne pas négliger les questions de mobilité et autres facilités d’accès aux transports communs», rappelle Claudine Speltz, membre du conseil d’administration de la Chambre Immobilière et administratrice au CEPI.
Pour un investisseur occasionnel (mais cela est valable pour un premier achat), Céline Cokelaere de Unicorn conseille de définir un budget en accord avec une localisation prisée par l’acheteur ou d’éventuels locataires. La proximité des zones proches des bassins d’emplois est essentielle. Il faut par la suite comparer les offres en détail et sélectionner des projets de promoteurs ayant une excellente réputation, respectant les promesses de la notice descriptive et appliquant un bon rapport qualité / prix.
La question de l’investissement de moyenne ou longue durée est également importante afin de connaître la typologie à privilégier en fonction du souhait de faire une plus-value rapidement ou miser sur un pur rendement locatif. Toujours selon Unicorn, le taux de rendement recherché pour un investissement locatif à Luxembourg ville est de 2-3%/an, en dehors, de 3 à 5% an. Toujours dans le cas d’investissement occasionnel, Alain Alf de chez Cialux préconise de se tourner vers l’immobilier en vente en état futur d’achèvement (VEFA) et de maintenir le bien entre 10 à 20 ans en location avant de le revendre.
Y a-t-il une bascule qui s’est opérée entre appartement et maison ? A cette question, Delphine Romano, Inowai, sourit : «Entre la volonté et le budget, cela ramène vite à la réalité. Certes, les appartements sans balcon ont moins la côte mais les prix augmentent au même rythme que les années précédentes (environ 10% par an) donc...»
«Le changement notable est que les gens désireux d’investir se tournent majoritairement vers la pierre (d’autant plus qu’avec notre mode de vie actuel, ils ont pu épargner et souhaitent maintenant investir). Les banques octroient des prêts pour les particuliers pouvant fournir 10% d’apport, pour une habitation principale (il sera demandé 20% aux investisseurs)», ajoute-t-on chez Inowai.
Investir, c’est aussi envisager une nouvelle dynamique, une nouvelle conception de vie. Comme le précise Alain Alf, «les quartiers neufs sont souvent soumis à des concepts de vie innovants, par exemple, l’idée du quartier sans voiture, accessible à pied, vélo ou transport public, avec un lieu de travail possiblement à proximité, tout comme les commerces, lieux de détente, universités et/ou gare.» Un concept qui fait du reste son chemin dans le monde, nous en voulons pour preuve l'idée de «la ville du quart d’heure», promue par l’universitaire Carlos Moreno.
Faster (l'immobilier grimpe, grimpe...)
Quand on demande à Lex Fischbach si acheter neuf est une aventure dans laquelle on peut encore se risquer, la réponse fuse : «Considérant les taux bancaires, oui ! L’argent sur un compte ne rapporte presque plus rien. Certes, dans l’immobilier, on ne génère plus les taux de jadis, mais un taux convenable est atteignable, tout en gardant en plus en tête que le bien ne « disparaitra» pas et gagnera en valeur avec le temps. De plus, l’acte d’achat se fait uniquement sur le terrain ce qui entraine une baisse considérable des frais d’acquisition».
«Les délais sont certes un peu plus longs mais il n’y a pas d’impact désastreux de la Covid.»
Arrêtons-nous ici un instant pour évoquer les baux emphytéotiques ! Delphine Romano explique : «Cela s’envisage de plus en plus pour le grand public en alternative au foncier quand il devient de plus en plus difficile d’acquérir eu égard aux hausses immobilières. L’Etat étant propriétaire de nombreux terrains, on peut bénéficier d'un large choix pour des projets bien situés.
Concrètement, on peut espérer payer moins cher un bien de ce type par rapport à un achat traditionnel puisque le terrain est « loué » pour la durée de l’emphytéose et les droits d’enregistrement s’élèvent à 0,6 % sur la part que représente le terrain. Vous bénéficiez en outre d’un abattement fiscal de 5% pendant 5 années, d’une garantie bancaire d’achèvement, une garantie biennale et décennale. Par ailleurs, vous avez le choix ; celui des matériaux et des technologies énergétiques du moment (moins de charges, bénéfice pour l'environnement).
Last but not least, ayant fait le choix d'un bien neuf, vous jouissez d’un habitat dans un état impeccable, construit avec finitions et matériaux des plus récents.»
Fernand Hornung de Unicorn, abondant en ce sens, le développe ainsi : «Même si aujourd’hui l’augmentation des prix et des loyers n’évolue pas au même rythme et que le taux de rendement a tendance à baisser, il s’agit tout de même d’un placement financier plus rentable et plus sûr. Pour exemple, il y a 3 ans, il était à 4.5% dans le Sud, 3.6% en ville et aujourd’hui, 3.5% au sud et 3% en ville. Après 6 ans, avec la plus-value générée lors de la revente, les avantages fiscaux, notamment par l'amortissement accéléré avec les loyers, engendrent un rendement qui approche les 8 % par an.»
Stronger (plus fort en étant propriétaire ?)
«Dans la situation actuelle, on ne peut pas dire qu’il y a un impact Covid sur les ventes. Les délais concernant les autorisations de bâtir sont effectivement globalement un peu plus longs mais nous restons très positifs. Il y a toujours un réel engouement pour l’achat immobilier», constate-t-on chez Inowai. «Investissez dans la pierre, on ne peut pas parier sur un écroulement de l’économie au Grand-Duché, tout au plus un ralentissement», ajoute Claudine Speltz.
Au-delà de la satisfaction de se sentir chez soi (ou d’avoir investi dans l’immobilier pour faire fructifier son patrimoine), Luxembourg reste Luxembourg, chers lecteurs. Infrastructures au top, dynamique culturelle, carrefour européen extrêmement bien desservi, stabilité politique et criminalité quasi inexistante en font un petit joyau. «Evidemment on prend toujours un risque, évidemment c’est un pari sur l’avenir mais quel bonheur d’aller ainsi de l’avant», résume Francesca qui vient de s'engager pour un appartement dans un complexe récent dans le sud du pays.
Depuis un certain temps déjà, l’Etat a entamé une réflexion sur l’accession possible à la propriété pour tous. Demander une aide financière étatique pour acquérir ou construire un logement (prime d'acquisition ou de construction) est possible. Les modalités pratiques et conditions à remplir sont dûment expliquées sur le site guichet.public.lu.
De plus, certaines communes du Grand-Duché favorisent l’accession à la propriété immobilière par des allocations en capital. Dans la plupart des cas, ces aides sont liées à la condition d’octroi d’une prime étatique. Il convient alors de contacter son administration communale pour se renseigner. Quoi qu’il en soit, à l’aune des éléments apportés par les professionnels interrogés ce moisci et quels que soient vos revenus, l’aventure est possible, voire souhaitable.
On ne dit pas que la tâche ne sera pas un peu ardue mais ce sera mieux (sans être rapide) et, au final, vous en sortirez plus fort. Harder, better, faster, stronger... Text: Alix Bellac